réflexion sur l'oubli

Oublier, serait-ce un symptôme ? Un mécanisme de défense ? L’oubli, existe-t-il ?


Nous retrouvons l’oubli au sein des maladies neurodégénératives, mais aussi au sein des maladies psychiatriques, et même chez les personnes « normales », dans la vie de tous les jours. Ainsi, nous le retrouvons dans le normal et le pathologique. Bien évidemment, l’oubli se rencontre de manière beaucoup spectaculaire dans les maladies neurodégénératives, jusqu’à en oublier qui nous sommes et qui sont les personnes qui nous entourent. Mais si nous observons notre comportement et celui des autres, nous pouvons nous rendre compte que l’oubli se retrouve dans la vie de tous les jours.

Les cognitivistes parlent d’attention. Dans notre quotidien, nous ferions plus attention à certaines choses qu’à d’autres. L’attention permettant toutes les autres fonctions cognitives dont la mémoire, si nous ne portons pas attention à certains éléments de notre environnement, nous ne nous en souviendrons pas. Ce qui me semble tout à fait cohérent.

Un symptôme aurait pour origine un échec du refoulement (mécanisme de défense). La représentation insupportable de la réalité n’ayant pas été refoulée fait symptôme, elle se décharge par le biais du symptôme.

Ainsi, si une représentation insupportable de la réalité, par exemple un accident de voiture ayant entraîné la mort d’un proche, n’a pas été refoulée, ou n’a pas été totalement refoulée, nous pouvons constater un oubli de l’événement ou d’une partie de l’événement. L’oubli serait alors le symptôme.

Dans le trouble de stress post-traumatique, nous pouvons retrouver l’oubli de ce qui a été insupportable. Cependant ce symptôme semble aussi correspondre à un mécanisme de défense.

En effet, oublier l’insupportable paraît similaire au refoulement. Qu’elle est la différence entre l’oubli et le refoulement ?

Nous parlons de refoulement lorsqu’une représentation insupportable passe du conscient à l’inconscient, mais ne serait-ce pas de même pour l’oubli ?

Ce qui est intéressant c’est qu’avec le refoulement, nous pouvons vivre un retour du refoulé. C’est-à-dire que la représentation insupportable resurgit sous une certaine forme. Par exemple, sous la forme de symptôme, sous la forme de rêves, de croyances, etc.

Mais avec l’oubli, pouvons-nous vivre un retour du souvenir ?
Chez les personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer, nous constatons tout d’abord un oubli des informations récentes (par exemple, la personne fait ses courses, et l’heure d’après ne s’en souvient plus), puis un oubli des informations lointaines (lieux de vie, date de naissance de ses enfants, de la mort de son conjoint, etc.), jusqu’à l’oubli de l’identité de son entourage et de sa propre identité. Nous pouvons nous demander comment est-ce possible, comment la perte neuronale peut provoquer une telle destruction des souvenirs, qu’est-ce qui se passe chez ces personnes, et comment se fait-il que des personnes ayant vécu des horreurs dans leur vie sont plus susceptibles de déclencher une maladie d’Alzheimer comme si elles voulaient oublier ces horreurs ?

Hors maladie d’Alzheimer, nous pouvons constater que des séances d’hypnose peuvent faire resurgir des événements de vie traumatisants. Nous parlons là de retour du refoulé, puisque ces événements ont été passés du conscient vers l’inconscient, l’hypnose permettant de faire parler l’inconscient. Donc nous ne pouvons pas dire que ces événements ont été oubliés puisqu’il en reste quelque chose dans l’inconscient. Est-il possible d’effacer complètement un souvenir de sa mémoire ?

Dans les amnésies des suites de traumatismes crâniens ou de pertes neuronales, il s’agit d’une destruction de certaines zones du cerveau. Notre psychisme dépend de notre corps, les souvenirs dépendent alors de notre cerveau.

Lors des amnésies post-traumatiques, des souvenirs peuvent resurgir par « flash-back » ou par des séances d’hypnoses. Les souvenirs n’ont donc pas été supprimés mais refoulés.

Dans notre vie quotidienne, si nous oublions telle ou telle chose, ça serait parce que nous n’y avons pas porté suffisamment attention.

De ce que nous vivons, au-delà des souvenirs d’une information, il reste toujours quelque chose comme une émotion, un sentiment de familiarité ou de déjà-vu, une croyance (exemple : pour quelqu’un ayant vécu un accident de la route à cause de l’alcool, la croyance comme quoi les personnes buvant de l’alcool sont dangereuses peut se développer), etc. Au sein d’un souvenir, il n’y a pas que l’information stricte comme un accident de la route, il y a aussi tous les affects qui l’entoure (émotions, etc.). Pouvons-nous vraiment oublier un événement ?
Chez les personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer, comment pouvons-nous expliquer que même si la personne ne se souvient pas de l’identité de sa fille elle garde tout de même un sentiment de familiarité voire d’attachement tout en étant persuadé que c’est une inconnue (car plus aucun souvenirs d’avoir été enceinte, d’avoir accouchée puis élever cette enfant, etc.) ?
Oublier serait pourtant la suppression de toutes ces informations, dont les émotions qui vont avec.
Nous entendons dire, en parlant d’une personne Alzheimer, « de toute façon elle va oublier », mais est-ce que nous en sommes vraiment certains ?
Dans notre vie quotidienne, nous disons souvent « ah bah j’ai oublié ! », mais avons-nous vraiment oublié tous les éléments de l’information ou avons-nous tout simplement jamais prêté attention à l’information ?


L’oubli, la suppression d’une information, existe-t-il vraiment ?